mardi 28 juin 2011

PRAGMATIQUE POLITIQUE : SÉLECTION NATURELLE CONTRE AUTO-PRÉSERVATION

Dans mon esprit, cela est clair. Le complotisme est mort-vivant. Tout comme la quasi-totalité des interprétations machiavéliennes qui considèrent que le monde s’écrit essentiellement sous l’impulsion de ses représentants, plutôt que par ceux qui les élisent et forgent la société au quotidien. Et les révolutions du monde arabe ne sont pas les seuls arguments susceptibles de contredire cette thèse.

De la mode paranoïaque…

politique,philosophie,social,antiracisme,gauche,droite,ump,ps,socialiste,fn,national,xénophobie,économieLes actions politiques sont guidées essentiellement par une force exogène à la politique, par la nécessité socioéconomique bien plus que par les stratégies politiciennes pour se maintenir au pouvoir. Considérer que ce sont des orientations politiques, soi-disant plénipotentiaires, qui sont la cause première du fait politique, serait au mieux un anachronisme, au pire un mensonge. Le monde ne maîtrise plus son destin collectif, voilà pourquoi d’aucuns le trouvent "fou". La peur du vide incite conséquemment à reconstituer le puzzle des évènements, lutter contre le sentiment d’absurdité en tissant des liens entre le passé, le présent et l’avenir, en s’abstrayant de l’illogisme, de l’instabilité économique, et de l’action au coup par coup qui en résulte. Dans le jeu d’échecs, on appelle cela "avoir un profil de tacticien plutôt que de stratège". A titre d’exemple, une critique virulente et subtile parfois adressée aux socialistes. J’en parle d’autant plus volontiers que je ne suis pas sympathisant socialiste. Je l’entends, ici ou là, ce discours bien rôdé de ceux que les journalistes traditionnels qualifient de "nouveaux réactionnaires" :

"L’antiracisme fut crée par la gauche qui, n’assumant pas sa duplicité idéologique, sa complicité avec l’immigrationnisme patronal et sa volonté de peser à la baisse sur les salaires des français, cherchait à les maquiller sous les traits plus acceptables du combat humaniste".

Ils supposent que les socialistes auraient été des cyniques et des criminels, visant à appauvrir et diviser la France pour mieux régner face à la droite. Et et et… et quoi encore ? Oublions la perversité, aussi fascinante qu’elle pût paraître pour certains esprits, et revenons à la gestion concrète des affaires de la cité. Le parti socialiste n’a rien maîtrisé du tout. Affirmer le contraire, ce serait lui prêter des vertus dont il n’a jamais pu s’enorgueillir, même pas dans ses rêves les plus audacieux. Quant à l’antiracisme et "l’immigrationnisme" si tant est qu’on leur accorde quelque consistance, rappelons qu’ils n’ont pas été mobilisés ex-nihilo, telles des fantaisies de l’esprit, mais bien sous l’effet d’une urgence sociale — choisissez le terme qui vous siéra.
  
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Cette gauche errante, en quête de nouveaux motifs de révolte pour mériter encore son intitulé "parti socialiste", a été
victime d’une profonde crise identitaire. Au moins aussi importante que celle des populations immigrées dont elle prétendait être le chantre. Avec sa "crise de la quarantaine", cette déracinée s’est un jour réveillée en prenant conscience que le monde avait changé bien plus vite qu’elle. D’abord inopérante face à la nouvelle donne internationale, pragmatique et financiarisée, elle peina à recycler ses bons sentiments en un projet réaliste et pertinent.

La mue a été difficile. À présent la voilà décomplexée, relookée, modernisée bien qu’amputée de son champion naturel DSK. La voici sous une étiquette majoritairement sociale-démocrate assortie d’une dose raisonnable de discours sécuritaire. Merci Obama.

…aux interprétations tendancieuses

A la vérité, il serait utopique de se figurer les partis politiques comme des monolithes. Ce sont des rondes de danseurs, qui se forment, se rompent, et se recomposent en permanence, à partir de nouvelles sensibilités, personnalités, le tout sur des rythmes changeants. Ne laissons pas la terminologie traditionnelle nous abuser. Il n’y a jamais eu une gauche ou une droite immuable. Ce qui n’empêche pas les courants de revendiquer des filiations intellectuelles et d’en jouer auprès des électeurs. Parfois jusqu’à la caricature. Au parti radical valois, la laïcité, l’humanisme athée, le primo-libéralisme artisanal. Au parti socialiste, les grandes causes populaires et humanitaires, la redistribution, l’amélioration des conditions de travail et de vie. A la droite républicaine, les grandes réformes régaliennes de l’Etat, de l’Education, la défense du patrimoine familial et foncier, la baisse des charges et l’encouragement à entreprendre. Seulement, les partis évoluent et il est évident, de l’aveu même de leurs cadres, que la conservation du nom n’est guère plus qu’une survivance. Un phare qui ne produit plus qu’un mince filet de lumière dans lequel on cherche quelque espoir, lorsque le vent mauvais électoral fait chavirer les certitudes. "Souvenons-nous, matelots ! Jaurès, Blum, Mendès… Soyons fiers de tenir les gréements socialistes !"

Épopée réaliste ou réalisme épique ?

Surtout, les partis sont tributaires des conditions réelles, des modes de production et de consommation. Pour survivre, ils doivent certes prendre position sur l’échiquier politique, réinventer ou réactualiser leur sémantique. Néanmoins, leur marge de manœuvre reste limitée : ne pas en faire assez, c’est être incompétent, en faire trop c’est être inutile. La satisfaction du politique est bien moins celle d’une vanité naïve que d’un eudémonisme rencontrant opportunément l’intérêt général. Le politique le plus ambitieux n’est pas un caporal ni un notable de province. C’est un empereur romain assoiffé de la plus grande gloire qui soit : celle du demi-dieu qui fait triompher ses principes et ses actions jusqu’à les coiffer des lauriers de l’immortalité.

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