dimanche 25 mai 2014

LE SOIR OU LE FN ME FIT PLEURER...

J'avoue. J'ai versé une larme en découvrant la première estimation du résultat des élections européennes de ce jour, dimanche 25 mai 2014. L'émotion était forte, même si j'ai du mal à l'interpréter. Joie réelle ou sarcastique, espoir, dépit, peine, étonnement, stupéfaction, quoi qu'il en soit les faits sont là : le FN enregistre un score historique en récoltant 25% des suffrages, devant l'UMP à 20% et le PS loin derrière, rétrogradant encore par rapport à 2009 pour atteindre un niveau humiliant de 14%. Le verdict journalistique le plus radical vient pour l'instant de la une du Libération de demain : "La France FN".

Si le 21 avril 2002 fut une "claque" pour le système UMPS, le 25 mai 2014 restera dans l'histoire comme un véritable coup de tazer dans ses parties sensibles ! On pourra bien sûr relativiser en rappelant que le premier parti de France, ici comme durant les récentes municipales, reste l'abstention (à près de 56%) et que, de fait, une majorité d'électeurs français n'est toujours pas plus convaincue par le FN que par les autres partis traditionnels. On pourra aussi minorer la défaite de l'UMP en pariant que si l'UDI n'avait pas fait cavalier seul il aurait permis au parti de Copé de dépasser le FN. Il n'empêche que pour Hollande, Copé, Mélenchon et consorts, ça fait mal et ça la fout mal. "C'était prévisible" entend-on partout. Prévisible mais aujourd'hui avéré. Hollande et Valls ont rendez-vous demain pour une réunion de crise et selon les informations d'itélé "l'Elysée en tirera les leçons".

Quelles leçons l'équipe Hollande pourrait-elle tirer ? D'ores et déjà, le premier ministre Manuel Valls a donné la consigne et distillé les éléments de langage du PS : "Il faut aller plus vite dans les réformes". Le remaniement ministériel venant d'avoir lieu, il est peu probable qu'un nouveau groupe se forme autour de Flanby Ier ou de Quand Même Ier. La dissolution de l'Assemblée nationale réclamée par les cadres du FN a également peu de chances de rencontrer un écho favorable. En revanche, je miserais volontiers sur une accélération... dans le frémissement du retournement de tendance. Blague à part, si Hollande, "comprenant le message" de la défaite du scrutin municipal, effectua un virage à droite au sein de l'exécutif en y plaçant Manuel Valls, il y a ici deux possibilités relatives à la future ligne gouvernementale. Soit, entendant encore plus fortement le message que l'électorat français se droitise (selon les codes du système qui catalogue le FN à l'extrême-droite), Hollande ira plus loin dans cette droitisation en feignant de la confondre avec une volonté droitière d'un libéralisme plus échevelé (c'est quelque peu pervers, mais je rappelle qu'on parle bien du PS, donc voilà...). Soit, il accélérera les effets de sa sociale-démocratie européiste, jouant le quitte ou double et espérant maintenir le navire à flot pour 2017. Auquel cas, on peut craindre des protestations d'amour régulières pour l'UE, et un lavage de cerveau accru sur fond, par exemple, de conférences, d'allocutions ou simplement de documentaires télévisuels de plus en plus fréquents mettant en garde contre les dangers de l'extrême-droite et du repli protectionniste qui, fatalement, aboutirait au fascisme, au nazisme etc.

Ce que je peux vous certifier en revanche c'est que le candidat UMP 2017 mettra le cap sévèrement à droite, en s'inspirant de la méthode Sarkozy 2012. Le siphonnage a fonctionné, il fonctionnera encore, voilà ce que parieront les ténors du parti droitier. Car, même si la soirée en est, une fois de plus, au règlement de comptes à OK UMP, le temps viendra des conclusions drastiques, et l'UMP elle aussi lancera son : "Nous avons compris le message". Et Copé se fendra, comme il l'a tant fait durant les années 2000, d'un très déterminé : "Nous ne laisserons pas le terrain de la sécurité et de l'identité nationale au FN". Je vous le dis, ça promet pour 2017...

Au-delà de la performance frontiste de ce jour, tout reste à prouver. J'attirerai simplement votre attention sur ce point que le FN, à présent premier parti de France au Parlement européen, non seulement obtient le plus grand nombre de sièges (entre 22 et 25, soit environ un tiers de la représentation française à Strasbourg), mais s'apprête à encaisser le plus gros chèque en provenance des contribuables européens, à savoir une somme dépassant les 45 millions d'euros, pour la totalité des députés et collaborateurs marinistes sur les 5 ans de la législature (sur la base de 36 000 euros / mois, nets d'impôts). Oui, on parle bien du parti qui se veut le plus hostile aux institutions européennes. Drôle, pathétique, pied-de-nez, arnaque, paradoxe... Je vous laisse libre de choisir le mot qui vous convient. En même temps, comme l'a souvent souligné François Asselineau, ni la sortie de l'euro, ni celle de l'UE ne figure dans une quelconque profession de foi du FN. Florian Philippot ce soir parla même de "reconstruire l'Europe". Une expression ambiguë, pour le moins. Mais allez, passons, et admettons même qu'on reste encore longtemps au sein de l'UE et de l'euro. En attendant un éventuel changement de la forme européenne, la seule chose qui importe, c'est de savoir si la France se portera mieux et que cette équipe protégera plus efficacement notre pays de décisions iniques. Le FN, fort de ses nouveaux droits et donc de ses nouveaux devoirs et responsabilités, a déjà bien conscience qu'on l'a à l’œil. Sans mauvais mot, en la circonstance.